On ne badine pas avec l’amour (Musset)
Introduction
A la tension extrême du drame (Lorenzaccio), Musset préfère la comédie, pleine de grâce et de facilité naturelle.
Sa gamme est variée : simples conversations de salons (Un Caprice, Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée), « proverbes » à la mode du XVIIIe siècle (Il ne faut jurer de rien), intrigues plus complexes (Fantasio, Barberine, Le Chandelier), pièces à mi-chemin entre la comédie et le drame comme Les Caprices de Marianne et l’œuvre au programme en 2025 : On ne badine pas avec l’amour (1834).
Remarque : Ne les destinant pas à la scène, Musset écrivit ses comédies sans souci des conventions théâtrales.
Résumé de l’ouvrage
Au terme de ses études, Perdican rentre au château paternel, accompagné de son précepteur Maître Blazius. Le même jour, escortée de Dame Pluche, arrive aussi sa cousine Camille qui sort du couvent. C’est le baron, père de Perdican, qui a combiné cette rencontre : il veut marier ces enfants qui « s’aimaient d’ailleurs fort tendrement dès le berceau ». La première entrevue est plutôt décevante : Camille, très réservée, refuse d’embrasser son cousin. Elle a entendu dire tellement de mal des hommes qu’elle a peur de l’amour et préfère revenir au couvent. Cette résistance va rendre Perdican fou amoureux de sa cousine. De dépit, il descend au village proche et fait la cour à la naïve Rosette, sœur de lait de Camille. Il s’arrange pour que celle-ci le voit auprès de Rosette et jette dans la fontaine l’anneau que Camille lui avait autrefois donné. Camille, jalouse, a tout entendu et reprend son anneau. Elle fait venir Rosette dans sa chambre, lui affirme que Perdican ne l’aimera pas et ne l’épousera pas. Pour le lui prouver, elle la dissimule derrière une tapisserie, d’où elle assistera à un entretien de Camille et de son cousin. Jeu cruel, assaut d’escrime qui fait songer à ceux de Marivaux où s’exprime un amour qui s’ignore. Mais le ton est plus sombre : Musset a trop souffert à Venise (cf. George Sand) pour traiter la passion avec le sourire. On est sans doute proche également de Racine (Acte III, scène 6). Perdican s’entête à vouloir épouser Rosette, Camille se moque. Mais ils ne peuvent dominer leur amour : ils finissent par convenir qu’ils sont insensés et se jettent dans les bras l’un de l’autre. Un cri retentit alors : c’est Rosette, qui les épiait, et qui tombe morte. Sa fin tragique sépare à jamais Camille et Perdican. En effet, « on ne badine pas avec l’amour ».
Mots-clés
fantaisie, émotion, lyrisme, vérité humaine
Acte II, scène 5 (Extrait)
Camille, par peur d’être déçue par l’amour, refuse d’épouser le jeune Perdican.
PERDICAN
« Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu'on te fera de ces récits hideux qui t'ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière ; et on se dit : “ J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. »
Piste de lecture : l’expression lyrique de la vision romantique de l’homme.
- Comment Perdican rend-il convaincant son plaidoyer en faveur de la condition humaine ? Pour répondre, suivre les consignes suivantes :
- Comment est construite cette tirade ?
- Etudier le jeu des oppositions
- Quelles sont les marques du lyrisme ?
- Quel image de l’être humain se dégage du discours de Perdican ?
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Date de dernière mise à jour : 24/04/2024