Robes de cour
Présentation à la cour de Versailles
Que de complications et, osons le mot, que de souffrances, afin de respecter l’étiquette !
Voyez cet extrait des Mémoires de Mme de Genlis :
« Elle (Madame de Puisieux) ne me parla que de la manière dont je devais me coiffer, m'exhortant d'un ton critique à ne pas me coiffer si haut qu'à mon ordinaire, m'assurant que cela déplairait beaucoup à Mesdames (les filles de Louis XV) et à la vieille reine […]. Mesdames de Puisieux et d'Estrée me persécutèrent véritablement le lendemain, jour de ma présentation ; elles me firent coiffer trois fois, et s'arrêtèrent à la manière qui me seyait le plus, et qui était la plus gothique ; elles me forcèrent de mettre beaucoup de poudre et beaucoup de rouge, deux choses que je détestais ; elle voulurent que j'eusse « mon grand corps » (1) pour dîner, afin, disaient-elles, de m'y accoutumer ; ces grands corps laissaient les épaules découvertes, coupaient les bras et gênaient horriblement ; d'ailleurs, pour montrer ma taille, elles me firent serrer à outrance. La mère et la fille eurent ensuite une dispute très aigre au sujet de ma collerette, sur la manière de l'attacher ; elles étaient assises, et j'étais debout et excédée pendant ce débat. On m'attacha et l'on m'ôta au moins trois fois cette collerette ; enfin, la maréchale l'emporta de vive force d'après la décision de trois femmes de chambre, ce qui donna beaucoup d'humeur à Madame de Puisieux […]. Lorsque le maréchal m'aperçut, il s'écria : « Elle a trop de poudre et trop de rouge ; elle était cent fois plus jolie hier… »
Et voici ce qu'en dit Mme de la Tour du Pin dans ses Mémoires (Mercure de France, 1979) :
« J'étais en grand corps, c'est-à-dire avec un corset fait exprès sans épaulettes, lacé par derrière, mais assez étroit pour que la laçure, large de quatre doigts en bas, laissât voir une chemise de la plus fine batiste à travers laquelle on aurait aisément distingué une peau qui n'eût pas été blanche. Cette chemise avait des manches de trois doigts de haut seulement, de manière à laisser l'épaule nue. La naissance du bras était recouverte de trois ou quatre rangs de blonde ou de dentelle tombant jusqu'au coude. La gorge était entièrement découverte. Sept ou huit rangs de gros diamants que la reine (Marie-Antoinette) avait voulu me prêter cachaient en partie la mienne. Le devant du corset était comme lacé par des rangs de diamants. J'en avais encore sur la tête une quantité, soit en épis, soit en aigrette. […] Des talons étroits, hauts de trois pouces (2), un panier de baleine lourd et raide, s'étendant à droite et à gauche ; une coiffure d'un pied de haut surmontée d'un bonnet nommé « pouf », sur lequel les plumes, les fleurs, les diamants étaient les uns sur les autres, une livre de poudre et de pommade que le moindre mouvement faisait tomber sur les épaules. »
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Notes
(1) Corset
(2) Le pouce valait alors 27mm.
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