Mode 1789
Mode en 1789 : vers la simplicité
On peut lire dans un Almanach de la fin du siècle les lignes suivantes (auteur inconnu) :
« Depuis la prise de la Bastille, la mode connaît à Paris un profond renouvellement. Tailleurs, marchandes de modes, merciers, chacun commémore à sa façon le grand événement et invente des modèles et des accessoires qui rappellent les symboles révolutionnaires baptisés de noms évocateurs. C'est ainsi qu'un bonnet est intitulé « aux trois ordres de la nation », que la cocarde tricolore orne ostensiblement les chapeaux ou les boutons. Comme les temps sont durs et que l'état est au bord de la faillite, les artisans imposent des créations modestes et sobres. Ainsi les montres - objets de luxe - sont attachées avec un ruban de soie et perdent leurs chaînes d'or - on les porte en dedans de la ceinture du jupon -, les femmes délaissent les extravagants chapeaux surmontant de volumineuses coiffures pour revêtir de simples bonnet « à la citoyenne », qui finissent harmonieusement une toilette « à l'épargne [...] Un effet de l'influence de la Révolution sur les marchandes de plaisir, c'est leur mise actuelle. Au lieu de ce délabrement indécent que même les femmes de bon ton avaient eu l'impudence d'adopter, à la place de ces robes traînantes, vrais balais du Palais-Royal, et de ces coiffures énormes, on voit maintenant un caraco simple, d'une propreté recherchée, une coiffure décente, qui donne un vernis de virginité à la beauté la moins vierge ; des cheveux noués avec grâce par un ruban bleu. Une jeune femme de condition relativement modeste porte par exemple un casaquin d'indienne à fond bleu, avec de petites raies plus foncées, parsemées elles-mêmes de petits bouquets à fleurs rouges, une jupe de dessus en flanelle couleur lie de vin à petits carreaux rouges, un tablier d'indienne également, sur fond blanc, avec de petits carreaux rouges, des bas de coton blanc, des souliers plats, un mouchoir d'Aubenas à fond rouge avec des raies et des carreaux blancs, un bonnet en dentelle assez simple, un chapeau rond et blanc en laine fine, bordé d'un ruban bleu, une bague ronde en or au petit doigt de la main gauche. »
Daniel Roche, dans La Culture des apparences, nous dit qu’il est « des époques, en effet, particulièrement propices à l'extension d'une mode. Lorsqu'on les examine de près et qu'on s'efforce d'en déterminer la genèse, on s'aperçoit en général que son apparition elle-même est antérieure à l'événement qu'elle a fini par symboliser. Ainsi, le goût pour la simplicité et le naturel qui caractérise les premières années de la Révolution, ne fait qu'amplifier le mouvement commencé à la cour, et même à la ville, quelques années plus tôt. Par le biais des marchandes à la toilette, toute une partie du peuple s'habille des vêtements portés par les riches quelques années plus tôt. Les indiennes à rayures et bouquets par lesquelles les élégantes pensent se travestir en bergères et qui sont à la mode en 1760, font aussi les beaux jours d'une révolution qui cultive l'amour de la campagne et associe systématiquement les femmes à la nature. On abandonne progressivement non seulement les coiffures à étages, mais aussi les talons. »
Commun à toutes les femmes, le fichu (cf. gravure) devenu « shall » selon la mode anglaise se fera aguichant sur les Merveilleuses du Directoire.