Mme du Deffand
Salonnière quasiment aveugle à la fin de sa vie, tombée amoureuse dans un âge fort avancé du jeune Horace Walpole, Mme du Deffand était la tante de Julie de Lespinasse.
Son salon de la rue Saint-Dominique était couru du tout-Paris. Elle ne publia rien mais nous disposons de sa volumineuse correspondance (notamment ses lettres à Voltaire) dont Sainte-Beuve a dit dans ses Causeries du lundi : « Elle est, avec Voltaire, dans la prose, le classique le plus pur de cette époque, sans même en excepter aucun des grands écrivains. »
« Vaporeuse » (autrement dit dépressive), elle voyait le monde avec une grande lucidité non dépourvue de pessimisme. Son jugement sur les uns et les autres était particulièrement tranchant. Revenue de tout, elle considérait que l'humanité ne comprenait que « trompeurs, trompés et trompettes. » Pour « tolérer la vie », elle s’adonnait à l’opium. Elle écrit dans la lettre à Horace Walpole du 20 octobre 1766 : « J'admirais hier au soir la nombreuse compagnie qui était chez moi, hommes et femmes me paraissaient des machines à ressort, qui allaient, venaient, parlaient, riaient, sans penser, sans réfléchir, sans sentir ; chacun jouait son rôle par habitude… et moi j'étais abîmée dans les réflexions les plus noires ; je pensais que j'avais passé ma vie dans les illusions ; que je m'étais creusé moi-même tous les abîmes dans lesquels j'étais tombée. »
Mais elle ne dénigre pas pour autant les plaisirs de la table. Dans une de ses lettres, elle décrit l'ordinaire de ses repas lors d'un séjour chez une amie à la campagne : « un bon potage de riz, des figues et des petits raves, des saucisses, des filets de mouton à la provençale, une poularde en fricandeau, un gigot de mouton à l'estouffade avec des épinards, une rognonnade de mouton et un morceau de bœuf, des perdreaux rouges et deux plats d'entremets. »
Madame du Deffand n'a rien publié mais sa Correspondance avec, entre autres, Voltaire et Horace Walpole révèle son esprit indépendant et sceptique, et constitue un document intéressant sur l'histoire de la société du 18e siècle. À ce titre, c'est une véritable femme de lettres, dans le sens premier du terme.Trois recueils de Lettres de Mme du Deffand paraissent à Paris en 1809 (correspondance avec Voltaire, le président Hénault, Turgot, d’Alembert et les autres Encyclopédistes), à Londres en 1810 (correspondance avec la duchesse de Choiseul) et à Paris en 1859 (correspondance avec Horace Walpole). La première édition complète date de 1865.
Une phrase à retenir : « Allez, allez, il n'y a que les passions qui fassent penser. »
Et cette réflexion : « Ah ! la raison, la raison ! qu'est-ce que c'est que la raison ? quel pouvoir a-t-elle ? quand est-ce qu'elle parle ? quand est-ce qu'on peut l'écouter ? quel bien procure-t-elle ? Elle triomphe des passions ? Cela n'est pas vrai ; et si elle arrêtait les mouvements de notre âme, elle serait cent fois plus contraire à notre bonheur que les passions ne peuvent l'être ; ce serait vivre pour sentir le néant, et le néant (dont je fais grand cas) n'est bon que parce qu'on ne le sent pas. »
Remarque
La correspondance de Mme du Deffand, rééditée aujourd'hui, est la source de nos articles, sauf exception.
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Amitié Voltaire et du Deffand
Durant une vingtaine d'années, Voltaire fut le correspondant attitré de Mme du Deffand et le confident de ses malheurs. -
Autoportraits de Mme du Deffand
Deux autoportraits littéraires de Mme du Deffand. Apparence et finances. -
Bons mots de Mme du Deffand
Mme du Deffand est célèbre pour son esprit et ses bons mots. -
Catherine II et Mme du Deffand
Mme du Deffand n'aime pas Catherine II. Lettres à Voltaire et Horace Walpole. -
Corneille et Mme du Deffand
Mme du Deffand a une prédilection pour Corneille, non dépourvue de réserves toutefois:génie mais manque de « goût », dans le sens du 18e siècle. -
Crébillon fils et Mme du Deffand
Mme du Deffand déteste Crébillon auquel elle préfère Marivaux. -
Mme du Barry : présentation à la cour
Deux témoignages sur la présentation à la cour de la comtesse du Barry : ceux de Mme de Genlis et de Mme du Deffand. -
Lanson et du Deffand
Analyse psychologisante de Mme du Deffand par Lanson, critique du 19e siècle. Cours et questionnaire aux écoliers. -
Le Barbier de Séville et du Deffand
Mme du Deffand décrit à Horace Walpole les aléas de Beaumarchais à propos de son Barbier de Séville. -
Mme de Maintenon et Mme du Deffand
La salonnière du Deffand correspond avec Horace Walpole à propos de Mme de Maintenon. -
Mlle Clairon et Mme du Deffand
Mme du Deffand va souvent au théâtre ou fait donner des représentations privées. Elle apprécie la comédienne Mlle Clairon. -
Mmes du Châtelet et du Deffand
Mme du Deffand n'aime pas Mme du Châtelet. Serait-elle jalouse de son intelligence ? -
Mme Louise et Mme du Deffand
Mme du Deffand relate l'entrée au couvent de Madame Louise, l'une des filles de Louis XV. Témoignage de Mme Campan. -
Mmes de Genlis et du Deffand
Dans ses Mémoires, Mme de Genlis témoigne de sa rencontre avec Mme du Deffand, qu'elle apprécie. La réciproque est vraie. -
Mmes de Sévigné et du Deffand
Mme du Deffand admire les lettres de Mme de Sévigné. -
Mmes Geoffrin et du Deffand
Mme du Deffand n'aime pas Mme Geoffrin. Est-elle jalouse de son salon ? -
Montesquieu et du Deffand
Estime réciproque entre Mme du Deffand et Montesquieu. Quelques échanges épistolaires. -
Raison et sentiment
Entre raison et sentiment, Mme du Deffand est à l'image du siècle des Lumières. -
Rousseau et Mme du Deffand
Mme du Deffand n'aime pas Rousseau, et réciproquement. -
Salon de Mme du Deffand
Description du salon de Mme du Deffand, connu dans toute l'Europe grâce à la Correspondance littéraire de Grimm.