L'Astrée ou le roman précieux
Bon à savoir sur L’Astrée (notes)
Il semble que le roman-fleuve quasiment illisible L’Astrée, d’Honoré d’Urfé, redevienne à la mode : on en propose quelques extraits aux élèves dans le cadre de l’étude du roman baroque et précieux.
* Titre exact : L’Astrée, où par plusieurs histoires et sous personnes de bergers et d’autres sont déduits les divers effets de l’Honnête Amitié => annonce du roman précieux (« honnête amitié »).
* Composition de l’ouvrage : cinq volumes divisés chacun en douze livres, plus de 5 500 pages. S’inspire du roman chevaleresque espagnol Amadis de Gaule (traduit en 1540-1556) et des pastorales espagnoles et italiennes : Diane (Montemayor, 1542), Galathée (Cervantès, 1584), Aminta (Le Tasse, 1581) et Pastor Fido (Guarini, 1585).
* Publication : première partie en 1607, deuxième partie en 1610, troisième partie en 1619, quatrième partie en 1624, restée inachevée à la mort de l’auteur et écrite par son secrétaire, Balthazor Baro.
* Réception du roman : le cadre rustique à l’apparente simplicité plaît au monde raffiné des salons ainsi que ses histoires d’amour galant qui flattent le goût du public précieux. Grand succès auprès des femmes et nombreux imitateurs (dont Mlle de Scudéry avec Le Grand Cyrus).
* Roman pastoral placé dans un cadre historique (Ve siècle) dépourvu de toute exactitude avec plus de deux cents personnages, princes et princesses déguisés en bergers et bergères. Intrigue principale (Céladon et Astrée) et intrigues secondaires (roman à tiroirs, technique encore nouvelle). Cadre bucolique et champêtre, nature idyllique (le cadre de l’histoire est le Forez natal de l’auteur). Mythe utopique de l’âge d’or : des bergers philosophes détiennent les clés de la sagesse.
Pistes de lecture
* Amants romanesques
* Roman et vérité => réalisme psychologique
* Roman et théâtre => scènes dramatisées
* Astrée, la Précieuse avant la lettre.
L'Astrée, bréviaire des salons précieux, un roman-fleuve baroque
L’Astrée, d’Honoré d’Urfé, est un roman-fleuve inachevé en cinq parties de douze livres chacune, mais l’auteur meurt après avoir achevé le quatrième livre de la quatrième partie : son secrétaire finalise l’ouvrage qui devient le bréviaire des salons précieux. Il se crée même une « Académie des Amants du Lignon. »
Astrée, bergère raffinée et oisive, habite en compagnie de son compagnon Céladon le Forez, contrée idyllique arrosée par le Lignon, au Ve siècle de notre ère. Plus de deux cents personnages les accompagnent. C’est la mode du roman pastoral, déjà très en vogue en Italie et en Espagne, selon la tradition inaugurée par les Bucoliques de Virgile.
Astrée, croyant à tort Céladon infidèle, le bannit de sa vue et Céladon, désespéré, se jette dans le Lignon. Astrée le croit mort mais il est sauvé par la nymphe Galatée qui le fait séjourner dans son palais et tombe amoureuse de lui. Cependant, le berger fidèle, sur les conseils du druide Adamas, revient parmi les siens déguise en fille, sous le nom d’Alexis : il pourra ainsi vivre auprès d’Astrée.
Ce roman à tiroirs multiplie les histoires secondaires, souvent racontées sous forme de débats sanctionnés par un jugement délivré par nymphes et bergères. Y sont exposés toutes les variantes des différentes conceptions de l’amour, néo-platonisme, libertinage, feintes, jalousies, sacrifices, viols, tromperies, amitiés passionnées et troublantes entre bergers déguisés en filles et bergères travesties en garçons, tout un univers de faux-semblant qui s’inscrit bien dans l’esthétique baroque.
L’Astrée devient la cible favorite des antiromans, comme Le Berger extravagant de Sorel ou Le Roman bourgeois de Furetière mais marque durablement l’imaginaire européen : l’ouvrage fait les délices de La Fontaine et de Rousseau qui avoue avoir songé à Astrée et Céladon en concevant Julie et Saint-Preux de La Nouvelle Héloïse.
On y trouve cependant ces lignes essentielles à propos de « l'honnête homme », l'idéal du XVIIe siècle : « Avez-vous bonne opinion qu'il faille nécessairement aimer pour être honnête homme ? - Oui, Madame, parce que pour être aimé, il faut être aimable, et ce qui rend aimable est cela même qui rend honnête homme. » Il ne suffit donc pas d'avoir des clartés de tout sans se piquer de rien, n'y joindre les agréments des mœurs et des manières à ceux de l'esprit. Du reste, Mlle de Scudéry ne dit pas autre chose dans Le Grand Cyrus, évoquant « cette hardiesse respectueuse, cette civilité galante et spirituelle que l'amour seul peut donner. » Plaire (au sens large) est donc un art dont il faut connaître les règles.
De la description ornementale du 17e siècle à la description expressive ou symbolique des siècles suivants
Ces dames tombaient en pâmoison à la lecture de ces lignes, provenant de L’Astrée d’Honoré d’Urfé, roman pastoral, sans doute le plus grand succès littéraire du début du siècle :
« Auprès de l'ancienne ville de Lyon, du côté du Soleil couchant, il y a un pays nommé Forez, qui, en sa petitesse, contient ce qui est de plus rare au reste des Gaules, car étant divisé en plaines et en montagnes, les unes et les autres sont si fertiles et situées en un air si tempéré que la terre y est capable de tout ce que peut désirer le laboureur. Au cœur du pays est le plus beau de la plaine, ceinte, comme d'une forte muraille, des monts assez voisins, et arrosée du fleuve de Loire, qui, prenant sa source assez près de là, passe presque par le milieu, non point encore trop enflé ni orgueilleux, mais doux et paisible. Plusieurs autres ruisseaux en divers lieux la vont baignant de leurs claires ondes, mais l'un des plus beaux est Lignon, qui, vagabond en son cours aussi bien que douteux en sa source, va serpentant par cette plaine depuis les hautes montagnes de Cervières et de Chalmasel, jusques à Feurs, où Loire, le recevant et lui faisant perdre son nom propre, l'emporte pour tribut à l'Océan. Or sur les bords de ces délectables rivières, on a vu de tout temps quantité de Bergers, qui, pour la bonté de l'air, la fertilité du rivage, et leur douceur naturelle, vivent avec autant de bonne fortune qu'ils reconnaissent peu la fortune. »
Au 17e siècle (comme au siècle précédent), la description ornementale domine. Elle n’est pas caractérisée par un souci réaliste mais par la recherche du beau. L’auteur en tel que tel et son originalité n’entrent pas en ligne de compte et l’écriture est soumise aux modèles et aux autorités. On utilise dons des topoï (clichés), avec ses lieux conventionnels et idylliques : cadres champêtres, fontaines et ruisseaux.
Au siècle suivant, avec les mutations sociales et les premiers éléments de constitution du littéraire, la description se fera expressive avec l’apparition du génie créateur (originalité et inspiration). L’imagination entrera en conflit avec l’imitation. Description expressive car la description tend à exprimer le caractère propre d’un auteur et elle se fonctionnalise en cherchant à symboliser plus précisément une atmosphère ou un personnage. Dans Paul et Virginie, par exemple, la nature tourmentée manifeste les tempêtes émotionnelles que vivent les personnages.
Ce sera donc le développement de la conscience narrative sous l’effet d’une tradition scripturale mais aussi d‘une autonomisation des auteurs et d’un élargissement du public. La description est perçue comme un ralentissement du récit dont il faut se méfier si l‘on veut conserver la fonction plaisante du roman. On met en cause les anciennes descriptions ornementales. En outre, les auteurs essaient de finaliser leurs descriptions par une fonction métonymique (les descriptions éclairent le pays et ses habitants, les objets renvoient au personnage). Cette fonction apparaît chez Rousseau (La Nouvelle Héloïse) ou chez Diderot (Jacques le Fataliste).
La tradition de la description expressive se poursuivra jusqu’au 19e siècle avec les Romantiques et même, de façon plus ponctuelle dans les romans du 20e siècle (relations métaphoriques entre les éléments de la nature et les émotions ou sentiments des personnages).
Sources : Yves Reuter, Introduction à l’analyse du roman, Armand Colin, première édition 1991.
Un art d’aimer...
Notes
* conflits du cœur => éducation sentimentale
* diverses attitudes possibles en amour chez les héros : Hylas incarne l’inconstance, Sylvandre l’adoration mystique, Céladon le service d’amour.
* Récit avec pauses, longues conversations entre bergers et bergères, analyses psychologiques => une théorie de l’amour.
* Définition de l’amour : élan irrationnel, un « je ne sais quoi », voies et maux divers.
* Donc, il faut un code, une discipline de l’amour pour éviter ces dangers.
* Sublimation progressive qui va de l’amour physique à l’amour spirituel (préfigurant l’amour de Dieu).
* Si impossible, ne pas se laisser emporter par le désir, préférer un amour fondé sur l’estime réciproque, la raison et les valeurs morales, sociales et culturelles => bonheur durable.
* Valeur exemplaire de l’histoire de Céladon et Astrée : Céladon, d’abord partagé entre désir sensuel et ascèse amoureuse, trouve l’équilibre. Astrée, elle, cherche à concilier pudeur et honneur. Mariage final : les deux amants peuvent vivre pleinement leur condition humaine (âme/chair et amour/société).
... et une symphonie poétique
* Histoires entrelacées
* Symétries et oppositions
* Effets de morcellement, de suspension, de ralentissement ou d’accélération de l’intrigue
* Dramatique comme une pièce de théâtre (dialogues, monologues, péripéties, quiproquos)
* Honoré d’Urfé est amateur d’art => tableaux variés, pittoresques, somptueux ; paysages raffinés, personnages gracieux
* A la prose se mêlent des vers (stances, sonnets, chansons) => expression lyrique des sentiments.
* Thèmes poétiques : évocation d’une Arcadie idyllique, nostalgie d’un âge d’or, culte de l’amour et de la nature => un rêve, un conte de fées.
Extrait : Désespoir de Céladon
Le berger Céladon et la bergère Astrée s’aiment depuis trois ans ; mais des propos calomnieux inspirent à Astrée de soupçons sur la fidélité de Céladon ; et, quand ce dernier vient au début du roman s’entretenir avec Astrée, celles-ci irritée le repousse. Céladon, désespéré, se jette dans le Lignon, d’où fort heureusement des nymphes le retireront simplement évanoui.
« Ignorant son prochain malheur, après avoir choisi pour ses brebis le lieu le plus commode près de celles de sa bergère, il lui vint donner le bonjour, plein de contentement de l’avoir rencontrée ; à quoi elle répondit et de visage et de parole si froidement, que l’hiver ne porte point tant de froideurs et de glaçons...
Ils étaient si proches du Lignon[1], que le berger y pouvait facilement atteindre du bout de sa houlette, et le dégel avait si fort grossi son cours, que, tout glorieux et chargé des dépouilles de ses bords, il descendait impétueusement dans Loire[2] [...]
Quand il voulut ouvrir la bouche, elle ne lui donna pas même le loisir de proférer les premières paroles sans l’interrompre, en disant : « Ce ne vous est donc pas assez, perfide et déloyal berger, d’âtre trompeur et méchant envers la personne qui le méritait le moins, si, continuant vos infidélités, vous ne tâchiez d’abuser celle qui vous a obligé à toute sorte de franchise !
Donc vous avez bien la hardiesse de soutenir ma vue après m’avoir tant offensée ; donc vous m’osez présenter sans rougir ce visage dissimulé qui couvre une âme si double et si parjure ! Ah ! va en tromper une autre, va, perfide, et t’adresse à quelqu’un de qui tes perfidies ne soient pas encore reconnues, et ne pense plus de te pouvoir déguiser à moi qui ne reconnais que trop à mes dépens les effets de tes infidélités et de tes trahisons. »
Que devint alors ce fidèle berger, celui a bien aimé le peut juger, si jamais telle[3] reproche lui a été faite injustement. Il tombe à ses genoux, pâle et transi plus que n’est une personne morte. « Est-ce, belle bergère, lui dit-il, pour m’éprouver ou pour me désespérer ? – Ce n’est, dit-elle, ni pour l’un ni pour l’autre, mais pour la vérité, n’étant plus de besoin d’essayer[4] une chose si reconnue [...] Va-t’en, déloyal, et garde-toi bien de te faire jamais voir à moi que je ne te le commande. »
Céladon voulut répliquer ; mais Amour qui oit[5] si clairement, à ce coup, lui boucha pour son malheur les oreilles ; et parce qu’elle s’en voulait aller, il fut contraint de la retenir par la robe [...] Mais elle, que la colère transportait, sans tourner seulement les yeux vers lui, se débattit de telle furie qu’elle échappa, et ne lui laissa autre chose qu’un ruban, sur lequel par hasard il avait mis la main [...] « Sois témoin, dit-il, ô cher cordon, que plutôt que de rompre un seul des nœuds de mon affection, j’ai maux aimé perdre la vie, afin que, quand je serai mort et que cette cruelle te verra peut-être sur moi, tu l’assures qu’il n’y a rien au monde qui puisse être plus aimé que je l’aime, ni amant plus mal reconnu que je suis. Et lors se l’attachant au bras et baisant la bague[6] : « Et toi, dit-il, symbole d’une entière et parfaite amitié, sois content de ne me point éloigner[7] en ma mort, afin que ce gage pour le moins me demeure de celle qui m’avait tant promis d’affection. »
À peine eut-il fini ces mots que, tournant les yeux du côté d’Astrée, il se jeta les bras croisés dans la rivière... »
Honoré d’Urfé, L’Astrée, 1e partie, livre I.
Extrait : Hylas ou l’inconstance
Hylas est tombé amoureux d’Alexis – qui n’est autre que Céladon déguisé en fille -. Au cours d’une conversation badine entre bergers et bergères, Alexis reproche son inconstance à Hylas qui défend ici sa conception de l’amour.
A côtés des amoureux transis comme Céladon, on trouve donc dans L’Astrée ce curieux personnage, Hylas qui a pour devise : « Une heure aimer c’est longuement / C’est assez d’aimer un moment. » On sait que La Fontaine voit en lui le véritable héros du roman. Ce stratège de l’amour qui défend les caprices du désir aura pour descendants le Dom Juan de Molière et les roués du 18e siècle.
Extrait
« ... Hylas alors, s’approchant d’Alexis : Je vois bien, ma maîtresse, lui dit-il, que vous ne savez pas encore de quelle sorte j’aime. Il faut que vous sachiez que je m’y gouverne tout ainsi qu’un marchand bien avisé : lors qu’il fait dessein d’acheter quelque chose, il regarde combien elle peut valoir, et puis amasse de tous côtés l’argent qui lui est nécessaire pour égaler ce prix. J’en fais de même ; car lorsque j’entreprends d’aimer une dame, je regarde incontinent quelle est sa beauté, car, comme vous savez, ce qui donne le prix aux femmes, ce n’est que la seule beauté. Et soudain, je fais un amas d’amour en mon âme, égal au prix et à la valeur qui est en elle, et lors que j’aime, je vais dépendant (1) cet amas d’amour, et quand je l’ai tout employé au service de celle pour qui je l’avais amassé, il ne m’en reste plus pour elle. Et faut, si je veux aimer, que j’aille ailleurs chercher une nouvelle beauté pour faire un autre amas d’amour, si bien qu’en cela mon argent et mon amour se ressemblent bien fort. Je veux dire, que l’un et l’autre, quand je les ai dépendus, je ne les ai plus, vous auriez donc quelque raison de craindre, ma maîtresse, si jamais je n’avais aimé ces nouvelles bergères ; mais il y a longtemps que j’ai dépendu tout l’amas que j’avais fait pour leur beauté, et qu’il n’y en a plus en moi pour elles. – Mais, mon serviteur, ajouta Alexis, les marchands qui sont riches, encore qu’ils aient une fois vidé leurs bourses, ils ne laissent de les remplir pour acheter la seconde fois ce que la première ils n’auraient pu avoir. – Or, reprit Hylas, c’est en quoi, ma maîtresse, ces riches marchands et moi ne sommes pas semblables ; car eux, par deux et trois fois reprennent et renouent leurs marchés, voire s’ils n’ont pas l’argent, l’empruntent sur leur crédit, mais moi, jamais plus je n’y reviens, lorsque la première fois j’ai manqué de l’acheter.
– Voilà, dit Daphnide en souriant, la plus belle façon d’aimer dont j’aye jamais ouï parler. – Il est vrai, dit Alexis, mais elle n’est pas tant à mon avantage que je désirerais bien, car j’ai peur que vous n’ayez bien tôt dépendu l’amour que vous avez amassée pour moi, et lors vous ne m’aimerez plus. – Il est certain, répondit froidement Hylas, que si je l’avais toute employée, vous n’en devriez jamais espérer en moi ; mais il est du tout impossible, parce que quand je fais cet amas d’amour, je le rends égal à la beauté que je veux aimer, et la vôtre étant infinie, vous devez croire que le monceau est grand de l’amour que j’ai mis ensemble pour l’égaler. – J’en serai bien aise, répondit Alexis, car ce me serait bien du regret de vous perdre, vous estimant comme je fais, et cela me fait vous supplier, si de fortune il n’y en avait pas un si grand monceau que vous le figurez, que vous rabaissiez un peu de votre dépense, afin que votre provision durât d’avantage. J’aime mieux que vous m’aimiez un peu moins, que si vous imitiez ceux qui dépendent en un jour ce qui leur pourrait suffire pour tout un an. – Ma maîtresse, dit-il incontinent, si vous n’avez que ce souci, vivez seulement en repos, car je vous assure que j’en ai tant que j’ai de quoi vous aimer plus longtemps que je ne vivrai. – Mais, mon serviteur, puisque vous avez tant d’amour pour moi, dit Alexis, encore me semble-t-il que vous devriez désirer que j’en eusse autant pour vous, afin que cette amour ne fût point boiteuse... »
L’Astrée, IIIe partie, Livre VII, 1619
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Notes
(1) Dépendre = dépenser
Réception de l’Astrée
Le succès de l’ouvrage fit naître des imitations. Les plus célèbres furent celles de Pierre Camus, évêque de Belley (1583-1653) qui voulut rendre le roman moral et religieux. Il composa un grand nombre d’ouvrages où les aventures les plus rocambolesques se mêlent à la dévotion, en un style qui prétendait à la délicatesse de saint François de Sales. Les lecteurs ne lui manquèrent pas, mais il n’est plus lisible.
Le roman fit les délices des femmes (Mme de Rambouillet, Mme de Sévigné, et bien d’autres). On le lut longtemps : Boileau, et La Fontaine l’appréciaient. Au XVIIIe siècle, Rousseau fit un pèlerinage au château d’Urfé.
Mais le roman pastoral amena une réaction, notamment les romans de Charles Sorel (1599-1674), l’Histoire comique de Francion (1622) où les personnages sont tirés de la société la plus vulgaire, ainsi que Le Berger extravagant (1628).
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Additif pour les agrégatifs 2024
La première partie du roman est au programme de l’agrégation 2024. Elle fut publiée en même temps que la deuxième en 1610.
- Le roman pastoral et psychologique -
Historique
En Espagne, la Diane de Montemayor (1542) racontait les amours de bergers et de bergères conventionnels dans un cadre bucolique. Traduite en 1578, cette œuvre célèbre eut en France un succès considérable. Au même genre appartient la Galathée de Cervantès (1584).
L’Italie, de son côté, produisait des pastorales dramatiques : l’Aminta du Tasse (1581) et le Pastor fido de Guarini (1585).
La société française sous Henri IV et sous Louis XIII se passionnait pour ce mélange piquant de naturel et d’affectation : elle l’applaudissait au théâtre ; elle était donc disposée à bien accueillir un roman français écrit dans le même goût et qui flattait son idéal de délicatesse et de galanterie.
Une certaine technique romanesque
Selon Sophie Livry qui s’interroge sur la technique romanesque dans son ouvrage Rouvrir le roman (2017), le schéma narratif sied parfaitement aux Contes de Grimm ou d’autres textes « où il y a quête et avancée ». Mais la narration linéaire comme mode de récit n’est pas forcément le but essentiel du romancier. Elle précise ainsi sa pensée : « Pensons à L’Astrée, roman-fleuve de plusieurs milliers de pages et de dizaines d’histoires enchâssées, paru de 1607 à 1627, qui se ramifie et se multiplie dans des digressions qui sont à la base même de sa logique et de son succès. »
Date de dernière mise à jour : 06/04/2024