Esprit précieux
On note :
* Un effort vers la distinction
La préciosité était essentiellement le désir de donner « du prix » à sa personne, à ses sentiments, à ses actes, à son langage, un effort conscient, un acte de volonté pour « se tirer du prix commun des autres » (abbé de Pure). Elle pouvait être agréable si elle restait dans les limites du bon goût et du naturel mais elle devenait ridicule lorsqu'elle versait dans l'affectation et l'outrance.
L'Hôtel de Rambouillet restait habituellement dans le cadre du goût et de la bienséance : « On n'y parle point savamment, mais on y parle raisonnablement, et il n'y a lieu du monde où il y ait plus de bon sens et moins de pédanterie. » (Chapelain, 1638). La littérature y était un divertissement d'amateurs parmi beaucoup d'autres. Mlle de Scudéry se défendait aussi de « faire la savante » mais son salon était plus porté vers la littérature et la science. En fait, ce fut le désir de se distinguer dans « les choses de l'esprit » qui détermina, du point de vue littéraire, la préciosité (ridicule ou non). À partir de 1650, la préciosité s'étendit à des milieux plus bourgeois mais le « bel esprit » est chose rare et il est dangereux de forcer la nature.
* Le goût des « choses de l'esprit »
« Je suis certain que la première partie d'une précieuse est l'esprit, et que pour porter ce nom il est absolument nécessaire qu'une personne en ait ou affecte de paraître en avoir, ou du moins qu'elle soit persuadée qu'elle en a. » (Somaize). Mais toutes les femmes d'esprit ne sont pas précieuses, poursuit-il, « ce sont seulement celles qui se mêlent d'écrire ou de corriger ce que les autres écrivent, celles qui font leur principal de la lecture des romans et surtout celles qui inventent des façons de parler bizarres par leur nouveauté et extraordinaires dans leur signification. »
Comme il n'est pas toujours facile de se distinguer par l'originalité de la pensée, les précieux et précieuses s'attachaient surtout à la forme : un langage piquant et ingénieux pouvait rendre une idée originale... Toutefois, c'étaient avant tout des mondains qui se défendaient d'être auteurs de profession - surtout les femmes ! - ; ils écrivaient pour leur plaisir, avaient un faible pour « l'impromptu » et pratiquaient les petits genres à la mode. Les précieux composaient des poèmes galants pour leurs précieuses, évitaient l'érudition et méprisaient les Anciens, « ces vieux barbons », précise l'abbé de Pure.
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