Le style de Racine
Il est simple et naturel, loin du sublime, sans effets particuliers, maximes ou sentences. Le « Qui te l’a dit ?» d’Hermione, « le « Seigneur, vous changez de visage » de Monime, la « Sortez » de Roxane sont des mots très simples appartenant à la conversation courante, terribles ou pathétiques sans doute, mais uniquement par leurs causes et leurs effets.
Racine emploie le mot noble quand il faut le mot trivial quand il est nécessaire, et toujours le mot exact, sauf dans les pages où il prête à ses personnages le langage conventionnel de la galanterie et des cours royales. Le style, simple donc, gagne en intensité.
Racine y mêle de la poésie : images et tableaux ouvrent des perspectives à l’imagination. Voici, sèchement énumérés par Corneille, les exploits de Thésée :
« Quand vous aurez défait le Minotaure en Crète,
Quand vous aurez puni Damaste et Périphète
Sinnis, Phoea, Sciron... »
Et les voici évoqués par Racine :
« Les monstres étouffés et les brigands punis,
Procuste, Cercyon et Sciron, et Sinnis,
Et les os dispersés du géant d’Épidaure,
Et la Crète fumant du sang du Minotaure... » .
Pour lui, les mots ont une valeur musicale et ils confèrent au vers une grande harmonie : qualité expressive des sonorités, habile distribution des accents rythmiques et des coupes secondaires. Lisons :
« Dans l’Orient désert, quel devint mon ennui !
Je demeurais longtemps errant dans Césarée,
Lieux charmants ou mon cœur vous avait adorée ! »
Les romantiques n’appréciaient pas Racine car sa poésie est l’opposé de la leur : elle n’est pas l’épanouissement de l’individualité intérieure et capricieuse et reste impersonnelle, donc éternelle. En ce sens, le théâtre de Racine est l’expression la plus parfaite du génie classique.
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