Femmes chez Regnard
Les femmes dans les comédies de Regnard
I. Angélique, héroïne du Joueur, de Regnard (1696)
Cette comédie emprunte beaucoup à Molière (comédie de caractère en vers), connaît un succès immédiat, suscite l’hommage de Voltaire un demi-siècle plus tard et des représentations régulières jusqu’au début du 20e siècle.
Valère est incapable de résister à sa passion pour le jeu. Quand il gagne, il ne veut plus entendre parler ni d’amour ni de mariage Quand il perd, il sent revenir sa tendresse pour Angélique, une jeune provinciale dont il engage le portrait chez un usurier. Ulcérée, Angélique le quitte mais l’espoir de gagner au jeu l’emporte sur la douleur de Valère, homme ordinaire victime de son vice, dont la vie et les actions sont marquées par la fatalité.
II. Les femmes dans Le Légataire universel (Regnard, 1708)
Isabelle sera l’épouse d’Éraste à la mort de l’oncle de celui-ci, Géronte. En effet, sa mère, Mme Argante, ne l’accepte pour gendre que s’il en devient le légataire universel. Mais voilà que le vieil avare se met en tête d’épouser Isabelle. Intervient alors Lisette, la servante de Géronte, aidée de son amoureux Crispin, le valet du jeune homme : ils veulent le faire renoncer à son projet. Soudain le vieillard meurt, intestat. Crispin revêt sa défroque et dicte au notaire, M. Scrupule, un faux testament qui institue Éraste légataire universel et où il n’oublie ni Lisette ni lui-même. Mais Géronte, que l‘on croyait mort, était seulement tombé en « léthargie ». Il ressuscite donc (!) et demande à faire son testament. Les complices le persuadent qu’il l‘a déjà dicté sous l’effet de sa léthargie et lui restituent son argent sous réserve qu’il approuve le testament et les deux mariages.
Le rythme, la fantaisie, la verve, les mots d’auteur, les perpétuels rebondissements, les scènes bouffonnes masquent un sujet finalement sordide et l’immoralité des personnages qui ne dissocient pas amour et intérêt.
Une double filiation apparaît dans Le Légataire, qui apparente Regnard à Molière et à la commedia dell’arte : Crispin rappelle Mascarille ou Scapin, et annonce Figaro. Lisette tient des servantes de la comédie italienne et de celles de Molière sa capacité à la ruse et à l’intrigue.
Mais Regnard ne cherche pas à présenter des mœurs et des caractères comme Molière : pour lui, le personnage, c’est l’acteur, qui ne se préoccupe pas du réel, prêt à tout dans un monde fait d’imaginaire et de fantaisie. 26 ans avant Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, Regnard donne droit de cité en France au théâtre à l’italienne qui ne se préoccupe pas du vraisemblable et demande la complicité du spectateur.
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Date de dernière mise à jour : 04/01/2020