Ode à Marie de Médicis (Malherbe)
Un ode bien ordonnée
Cette pièce de Malherbe marque le début de sa carrière officielle de poète de cour en 1600. Marie de Médicis arrive d’Italie pour épouser Henri IV. Elle est la mère de Louis XIII.
Avec cette poésie de circonstance, louange au ton bien solennel et lyrisme plein d’apparat, Malherbe se fait le chantre du pouvoir royal et de l‘ordre. Ce n’est pas forcément de la flatterie : son engagement politique au service de la cause monarchique est sincère car elle est à ses yeux la seule qui permette la restauration de l’ordre et de la paix (cf. « Prière pour le roi allant en Limousin » en 1606, « Prière pour le roi allant châtier la rébellion des Rochellois »).
L’ordre ! Le grand mot est lancé : pureté de la langue, correction grammaticale, bannissement des archaïsmes et provincialismes, abstraction, logique et clarté, technique et souci constant de la forme qui s’oppose à la « fureur poétique » des poètes de la Renaissance. Boileau s’exclamera dans son Art poétique : « Enfin Malherbe vint ! » Baudelaire admirera « son vers carré » et, plus récemment, Francis Ponge lui rendra hommage.
Ode à Marie de Médicis, sur sa bienvenue en France (extrait)
« Peuples, qu'on mette sur la tête
Tout ce que la terre a de fleurs ;
Peuples, que cette belle fête
À jamais tarisse nos pleurs :
Qu'aux deux bouts du monde se voit
Luire le feu de notre joie ;
Et soient dans les coupes noyés
Les soucis de tous ces orages
Que pour nos rebelles courages
Les Dieux nous avaient envoyés.
*
À ce coup iront en fumée
Les vœux que faisaient nos mutins
En leur âme encore affamée
De massacres et de butins.
Nos doutes seront éclaircis ;
Et mentiront les prophéties
De tous ces visages pâlis
Dont le vain ( ?) étude s'applique
À chercher l'an climactérique
De l'éternelle fleur de lis.
*
Aujourd'hui nous est amenée
Cette princesse que la foi
D'amour ensemble et d'hyménée
Destine au lit de notre roi.
La voici, la belle Marie,
Belle merveille d'Hétrurie,
Qui fait confesser au Soleil,
Quoi que l'âge passé raconte,
Que du ciel, depuis qu'il y monte,
Ne vint jamais rien de pareil... »
Marie de Médicis et la cour de Blois en fête
Lorsque Marie de Médicis se fâche avec son fils Louis XIII, elle tient sa cour à Blois, entourée de domestiques, aumôniers, officiers divers, dames et demoiselles de compagnie et sa dame d’honneur, la belle et vertueuses madame de Guercheville, une parente de Richelieu, environ quatre cent soixante personnes.
Elle commande à Boisrobert, poète à ses heures et resté à son service, une traduction en vers du Pastor Fido, la célèbre tragi-comédie en cinq actes de Guarini : quarante éditions du vivant de l’auteur. Cette traduction vaut à Boisrobert une pension de mille livres.
Tallemant des Réaux rapporte dans ses Historiettes que son intention « était de faire semblant de s’amuser à faire jouer des comédies pour empêcher monsieur de Luynes [favori de Louis XIII] d’avoir du soupçon d’elle. »
Elle invite aussi à Blois Mondor et Tabarin, bateleurs du Pont-Neuf et célèbres joueurs de farces : ils jouent tous deux aux questions-réponses du style « Pourquoi les femmes ont-elles les fesses plus grosses que celles des hommes ? Quel est le plus honnête du cul d’un gentilhomme ou d’un paysan ? Quel fut le premier créé de l’homme ou de la barbe ? »
On est loin du raffinement, et ceci explique en partie la réaction de la préciosité. Se succèdent à Blois les joyeux comédiens de l’Hôtel de Bourgogne. Trompe-l’œil des réjouissances ! Marie de Médicis a de longues conversations secrètes avec Richelieu. Elle s’échappe de Blois pour Angoulême, une nuit, franchissant la Loire en compagnie d’un seul gentilhomme. Forte femme ! Des noctambules la prennent pour « une drôlesse qui ne passe pas la nuit à enfiler des perles. »
Rude époque !
(Sources inconnues.)
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Date de dernière mise à jour : 13/10/2017