Le 17e, siècle lyrique ?
Vers 1670, on assiste à une (re)naissance du lyrisme qui s’exprime dans une voix féminine, celle des lettres qu’aurait écrites une Portugaise inconnue, ravagée par la passion : Lettres de la Religieuse portugaise, de Guilleragues, chose que l’on ignorait alors. Celle-ci s’exprime-t-elle donc ailleurs qu’au théâtre ? Qui est donc cette Portugaise ? Ou plutôt son auteur, que l’on connaît aujourd’hui ? Selon Saint-Simon, il « n’était qu’un garçon, gourmand, plaisant, de beaucoup d’esprit, d’excellente compagnie... », rien à voir avec son héroïne Marianna. On peut voir dans ces Lettres, en schématisant quelque peu, le lien dans le lyrisme entre Louise Labé et l’héroïne de Beaumarchais, Marceline : les femmes aiment, souffrent et crient leur désarroi. Le terme portugaise entre même dans le langage courant et s'emploie (notamment chez Mme de Sévigné) pour désigner une lettre sentimentale.
Ainsi la prose s’ouvre au lyrisme dont les limites restent incertaines avant de recouvrir au siècle suivant l’expression de la sensibilité.
Tout aussi paradoxale est la naissance d’un nouveau genre en cette fin de siècle réputé pour sa sécheresse classique, celui des contes de fées (et des chansons populaire) : les Contes de ma mère l’Oye de Perrault paraissent en 1697 et les Contes nouveaux ou les Fées à la mode de Mme d’Aulnoye en 1698 (qui a beaucoup emprunté au Pentaméron italien) : La Chatte blanche ou Cendrillon dépassent leurs auteurs.
On peut parler de la naissance d’une mythologie moderne calquée sur les traditions anciennes, vieilles légendes cristallisées en récits au charme sans doute tout aussi symbolique qu’énigmatique. Dans le conte de fées, la métamorphose remplace les descriptions et l’art du langage se résout à l’emploi de formules magiques : l’univers n’est plus à dire puisque sa réalité est niée à chaque coup de baguette, suscitant les apparences au gré du possesseur d’un pouvoir étrange. On s’émerveille, on se soumet, on se confond avec un univers illusoire : on ne peut agir sur des objets et des êtres indescriptibles dont la forme dépend d’une décision contre-nature, alors que l’instabilité de l’univers, reconnue dans le domaine scientifique au 17e siècle, peut s’exprimer puisqu’elle est l’effet des lois de la nature. Ainsi, l’esprit pourra-t-il être amené à se perdre et l’imagination lyrique à trouver sa finalité, au lieu de structurer par la parole les éléments épars du monde réel.
Puis le lyrisme semble s’effacer pour renaître avec l’éveil de la sensibilité au cours du 18e siècle, toutefois renié par certains.
Sources : Un certain XVIIe siècle, Jean Tortel, op. cit.
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Date de dernière mise à jour : 14/10/2017